MONTSEGUR ... Joie Parfaite de nos jeunes années
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La légende de Montségur commence à la fin de son histoire. Lorsque la forteresse cathare, trahie par certains alpinistes, succombe et livre 200 suppliciés volontaires sur l'autel brûlant de la foi cathare, cortège fantomatique et illustre dont le timbre des voix fait encore tressaillir les herbes folles du « Camp dels Cremats » et s'incliner les nuages traversant l'aire céleste du pog.
Juste après la fuite de quelques élus missionnés qui, dans la nuit du 15 au 16 mars 1244, emportèrent, suspendus au-dessus des précipices du Porteil, le trésor spirituel de l'Eglise Cathare, vers une hypogée naturelle dont le nom même du site demeure encore de nos jours tabou.
Ce trésor sur lequel a glosé une littérature abondante et farfelue et qui a généré moultes expéditions, de l'initiative individuelle et anarchique jusqu'à l'organisation industrielle d'une unité des « Totenkopf » de l'armée allemande en juin 1943, et dont les membres fouillèrent minutieusement quelques excavations et au pied du Saint-Barthélémy et sur le flanc du couloir du Soularac, leur histoire romancée par un certain Saint-Loup ayant soit-disant permis la découverte de tablettes de pierre gravée qui finirent enfouies dans l'un des glaciers tyroliens du Zillertal, endroit lugubre et meurtrier pour l'aventurier curieux qui y égarerait ses pas …
D'autres, armés de paramètres subjectifs, évaluent la destination de ce trésor à l'aune ou à l'azimut de leur flair initié, c'est selon, soit donc vers une spoulga d'Ornolac, soit dans un castel vers Montgrenier, Lordat ou Montréal-de-Sos, soit dans l'une des grottes-cathédrales de Lombrives, soit dans les sombres profondeurs de la forêt de Bélesta, soit encore englouti dans le lac troglodyte de la basilique Saint-Sernin à Toulouse, soit, alors, toujours conservé dans le réseau souterrain qui court à-travers le pog de Montségur qu'il n'aurait jamais quitté, la fuite des élus étant dans cette hypothèse une diversion stratégique.
Pour l'anecdote et la bagatelle, il suffira enfin de se souvenir d'un téléfilm sans prétention, passé inaperçu, sur Montségur justement ( avec le chanteur Marcel Amont ) … « les maîtres du Soleil » … réalisation fantaisiste mais qui détient, au moins, le mérite d'avoir mis en exergue la vocation plus solaire que guerrière de cette Nef Encalminée.
Et, comme personne n'en sait concrètement rien, sans complexe d'infériorité, nous nous sommes alors lancés à une époque sur la trace du Graal cathare. Arpentant les sentiers historiques, sondant chaque pierre de chaque ruine, consultant sans relâche les archives municipales, farfouillant inlassablement le moindre trou ariégeois ( entre deux hypocras ), dormant dans des duvets moisis afin d'entrevoir les premiers rayons du soleil nous désigner au solstice la pierre sous laquelle se dissimulerait le trésor, nous avons donc tenté notre chance.
Certes, on n'a pas fait fortune et l'escarcelle est plutôt maigre. Mais l'on y a gagné une certaine richesse, intarissable, impossible à dilapider et dont il nous restera toujours quelques menues pièces au fond du coeur, cette richesse frappée au coin du sens vrai, constituée de ces rencontres atypiques, de ces aventures vécues sous la voûte étoilée de nos années vagabondes, de ces paysages dont nos yeux se sont tant abreuvés que jamais la rigueur du temps et le froid des sentiments ne pourront ternir les couleurs dont sont aujourd'hui encore tissées nos mémoires.