Dans sept cents ans, le laurier reverdira ...
Après un simulacre de procès, le son de ces paroles prophétiques, prononcées sur l'estrapade d'un bûcher prestement dressé pour le sulfureux Guilhem Bélibaste, à la fois assassin, père de famille et dernier parfait, résonne toujours sur la pierre des tours du château de Villerouge – Termenès, dans cette Aude où chaque grain de poussière, chaque parcelle de terre et chaque morceau d'écorce colportent encore fidèlement le message lancinant des cathares sous le soleil brûlant de cette contrée reculée.
C'est à cet endroit qu'inopinément nous nous étions perdus en désespoir de n'avoir pu trouver la moindre station-service ouverte afin de pouvoir ravitailler nos deux chevaux pour un complément d'ordinaire bien mérité.
Et par la même occasion, nous avions donc eu conséquemment tout le loisir d'apprendre et de connaître l'histoire du scélérat meurtrier Bélibaste qui, suite à l'homicide d'un berger, abandonna sa famille pour rentrer dans la clandestinité et devenir, après quelques errements, l'ultime parfait occitan.
N'en déplaise à certains détracteurs viscéralement ligotés à l'olivier du félibrige montségurien, c'est quand même à Bélibaste que reviendra l'insigne honneur de l'augure, et, afin que la parole ne meure point avec l'homme qui la prononce, celle-ci se devra de frapper son auditoire au coin du symbolisme et de la spiritualité. Ce qui fut chose faite en ce 24 août 1321 …
Un an après, une trentaine de dolciniens périrent également par le feu pour s'être, à l'instar des cathares, érigés à l'encontre du dogme établi et avoir prôné des idéaux d'humilité et de pauvreté.
Ainsi, les sombres fumerolles n'en ont donc pas fini de tournoyer dans les airs et, loin des manigances politico - standardisées de nos récupérateurs patentés, le «vert» vertueux du laurier semble posséder encore quelque répit avant l'arrivée victorieuse d'une métempsycose annoncée et nécessaire où la Nature se devra de troquer la tunique de l'homme si elle ne veut pas périr à sa place.
« Tout est pur pour ceux qui sont purs » … Et même le feu n'y peut rien, lui qui génère la cendre et la suie.
Si donc un jour vous consentez à quitter l'autoroute des deux mers, n'hésitez surtout pas à visiter ce petit village médiéval des Corbières niché dans un contrefort des Pyrénées orientales. Mais faites le de vous même car pas un syndicat d'initiative ou autre office de tourisme ne le fera pour vous.