Une page déchirée de l'Histoire ...
Déchirée et habilement occultée sous les autres feuillets pléthoriques, lacrymaux et consensuels des classiques ritournelles de notre Histoire de France contemporaine, ritournelles dont les refrains scandés, glosés, éructés, fignolés puis imprimés sont enfin revendiqués et glorifiés par un aréopage de cerveaux connivents et repentants dans les beaux livres de la liturgie officielle rouvrant sans cesse les sempiternelles mêmes plaies tant le sang de celles-ci se peuvent d'être utiles à abreuver la bien-pensance en vigueur.
Mais il est une terre rude et sauvage qui éprouve et éprouvera toujours grand mal à absorber ce flux continuel de décombres idéologiques tant son humus a été jadis rassasié de sang et de cendres. Cette terre a aujourd'hui repris son nom générique : l'Occitanie …
Petite intrusion donc dans l'histoire officieuse et souterraine de cette contrée via la raclure léonine, feu Simon IV de Montfort, détritus de son époque dont l'élan nauséabond fut fort heureusement interrompu par les petites mains ouvrières de quelques femmes manoeuvrant une pierrière providentielle sur les remparts de Toulouse …
Élan qui eut toutefois le temps d'être jonché d'atrocités atteignant une abomination paroxystique et une barbarie indicible sous les yeux approbateurs du canonisé Dominique de Guzman, de l'inique Innocent III et de son légat pontifical, l'abject Arnaud Amaury.
Le 22 juillet 1209 à Béziers, sur l'air enjoué de « tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens », la vengeance divine, optant clairement pour le carnage systématique, massacrera ainsi 22 000 biterrois occis par un ost frénétique et aviné de ribauds, de brigands et de palefreniers incendiant tout sur son sillage. L'église de la Madeleine, repue de cadavres jusqu'à son parvis, voyait son accès impraticable tant l'amoncellement monstrueux de dépouilles en encombrait le sol.
La terreur continua jusqu'à ce printemps 1210 où, à Bram, joli petit village concentrique, les bourreaux de Simon de Montfort y crevèrent les yeux d'une centaine de prisonniers après leur avoir mutilé et le nez et la lèvre supérieure.
Ayant épargné l'œil à l'un d'entre eux, ce « survivant ophtalmique » fut ensuite chargé de guider grotesquement ce funeste cortège jusqu'au château de Lastours dans l'unique but d'impressionner la garnison en place.
L'horreur persista jusqu'au mois de juillet 1210 où, à Minerve, ces croisés mortifères y brûlèrent 150 Parfaits se refusant à abjurer leur foi. Premier bûcher d'une triste série que l’Église se complaira à compiler dans les caves anxiogènes de ses archives secrètes …
En mai 1211, malgré la résistance valeureuse des pierrières et des mangonneaux, Lavaur tombera sous le joug du fanatisme cruciforme qui y dressera un gigantesque bûcher destiné à la consumation expiatoire de 400 âmes. Livrée à la soldatesque de Montfort, la charitable Dame Guiraude y subira les pires outrages avant d'être jetée vivante dans un puits pour y finir lapidée et empierrée.
Ce fléau létal continuera à tracer en lettres de sang sa lugubre épopée à-travers les années et les lieux, entre autres, les villages de Rabastens, Montégut, Gaillac, Lagrave, Cahuzac, Laguépie, Bruniquel, Puycelsi, et caetera ...
On peut comprendre dès lors que certains occitans se puissent d'être plus favorables à la ré-introduction du loup ou de l'ours en ses terres qu'à celle de l'Hautiste ou du Francilien ...